Pourquoi masser au sol
Ce choix est initialement lié à une technique, acupression, mobilisation, vibration et étirement. Dans ma pratique, il s’est, quelque soit le type de soin, imposé comme un principe auquel je déroge si la condition physique d’un client ne le permet pas.
Les changements de position sont facilités car la crainte de la chute n’existe plus. La position assise ou allongée sur le côté sont plus sécures et pratiques pour les personnes ne pouvant pas s’allonger à plat ventre … Les bras ne sont plus figés le long du corps ou sur un support. Ils peuvent au gré des sensations s’ouvrir, se déplacer pour aller dans la position convenant à la personne. Surprenant et inhabituel, en fin de séance j’ai régulièrement des remarques sur le confort de l’installation.
Une exigence pour répondre aux besoins.
Pour le praticien l’exigence est plus flagrante. Être au sol oblige à être très rigoureux sur les placements et les appuis car d’eux, dépendent la justesse du toucher.
Si être en forme physiquement est une évidence tant sur table qu’au sol, le praticien doit cultiver sa mobilité et acquérir de l’aisance dans ses déplacements. En effet, s’il est aisé de rester debout et de mettre un pied devant l’autre, par contre la position au sol impose de se déplacer à genou tout en étant fluide.
La table de massage installe le client dans une position de receveur, réceptacle de l’action du praticien dans un schéma passif-actif. Le travail au sol rééquilibre les positions entre praticien et client. En effet dans cette horizontalité partagée une collaboration est possible car le mouvement est possible. Souvent je constate que le corps exprime un besoin de s’étirer, de s’étaler, parfois de se recroqueviller. Je laisse vivre et j’invite la personne à suivre ce ressenti. Ainsi, dans la libre expression du corps une collaboration entre client et praticien se développe et l’un comme l’autre deviennent acteurs du soin alors le schéma passif-actif s’estompe, les tensions se délient et la vie se réinstalle.
Le tatami un espace « Sacré »
Au salon ou à domicile, le tatami est un espace privilégié. Son apparence, son contact, l’odeur de son revêtement d’igusa concourent à l’émergence d’une ambiance apte à la détente et au soin. Il confère à ceux qui s’y trouve la possibilité d’une alliance pour explorer les mémoires d’un corps où l’apaisement est demandé.
Je qualifie volontiers le tatami «d’espace sacré» tant il participe à l’élaboration d’un moment singulier. De l’espace-temps du soin, praticien et client émergeront différents car chacun aura rencontré des sensations et des ressentis qui, durablement ou de façon plus éphémère, modifient ce qu’ils sont en hors du tatami. Cette sacralisation de l’espace est renforcée par la réciprocité du toucher et par l’adoption de la maxime «toucher un corps, c’est toucher une vie» (merci à celle qui l’a transmise). Si l’on adhère à ce caractère sacré, des actes et des paroles peuvent s’y exprimer, s’y dérouler tandis que d’autres en seront proscrites, y seront interdites.